Dans l’usine automobile PSA de Saint-Ouen, Luc Joulé et Sébastien Jousse font dialoguer deux manières de travailler très opposées. D’un côté, le musicien et compositeur Nicolas Frize arpente l’espace en chasseur de rythme. Attentif aux bruits, il capte les gestes et les paroles de ceux qui les produisent ou les subissent pour faire entendre leur voix. C’est la matière de sa création musicale. Le film en suit toute l’élaboration. En parallèle, Jousse et Joulé filment dans la durée les machines, les postes, les gestes des ouvriers qui se montrent dans leur activité mécanique. Mais chacun reste habité par lui-même, grâce à ses confidences en off, qui creuse la distance salutaire. De portrait en portrait, le film avance pour finir par cette création musicale que viennent jouer dans l’usine les travailleurs qui ont donné leurs sons, leurs temps, leurs voix à la construction de cette œuvre polyphonique qui leur rend hommage. Et le film vient lui aussi faire corps avec son sujet, réalisé à plusieurs, mêlé de tous ces labeurs, de toutes ces voix. Si créer et travailler à la chaîne continuent de s’opposer radicalement, la démarche de Frize comme celle du film, mettent le travail en commun et font converger le labeur vers la création.